Epidémiosurveillance en santé animale

Bilan de la situation relative à la FCO à sérotype 4 (FCO-4) en Corse au 24 août 2017

Par ordre alphabétique : Anne Bronner(DGAl)*, Emmanuel Bréard (Anses), Didier Calavas (Anses)*, Lisa Cavalerie (DGAl),
Françoise Dion (Races de France), Emmanuel Garin* (Coop de France),Marie Grandcollot-Chabot (DGAl), Sidonie Lefebvre (Sral Corse), Fanny Pandolfi (DGAl), Corinne Sailleau (Anses), Gina Zanella (Anses)

Auteur correspondant : fanny.pandolfi@agriculture.gouv.fr

* Membre de l’équipe de coordination de la Plateforme ESA

Bilan des foyers au 24 août 2017

Entre le 1er janvier et le 24 août 2017, 116 foyers de FCO ont été confirmés et notifiés officiellement par la DGAL, dont 33 suite à une suspicion clinique1 (Tableau 1 et Figure 1). Depuis janvier 2017, toutes modalités de surveillance confondues (voir Encadré), 290 élevages de ruminants ont fait l’objet d’analyses dont 44 dans le cadre de suspicions cliniques (Tableau 2).

Depuis janvier 2017, toutes modalités de surveillance confondues (voir Encadré), 290 élevages de ruminants ont fait l’objet d’analyses dont 44 dans le cadre de suspicions cliniques (Tableau 2).

Tableau 1 - Nombre de foyers de FCO (détectés par RT-PCR de groupe avec ou sans génotypage) par type de surveillance en Corse du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Modalités de surveillance lors de la première détection du virus dans l’élevage

Nombre de foyers

Nombre moyen d’animaux testés par élevage

(écart-type)

Nombre moyen d'animaux confirmés positifs par élevage suspect

(écart-type)

Moyenne

Min

Max

Moyenne

Min

Max

Surveillance programmée

83

3,8 (±3,6)

1

32

0,73 (±1,4)

0

10

Suspicion clinique

33

3,9 (±2,1)

1

9

2,6 (±2,3)

0

8

Figure 1 – Foyers de FCO détectés en Corse du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 1 – Foyers de FCO détectés en Corse du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Tableau 2 – Nombre d'élevages testés et de foyers par modalité de surveillance et par espèce en Corse du 1er janvier au 10 août 2017 inclus   

Tableau 2 – Nombre d'élevages testés et de foyers par modalité de surveillance et par espèce en Corse du 1er janvier au 10 août 2017 inclus

SO: sans object

Analyse détaillée au 24 août 2017

Depuis janvier 2017, il y a eu 44 suspicions cliniques de FCO dans des élevages ovins, deux dans des élevages caprins et une dans un élevage bovin (Figure 2). Au total, 32 suspicions cliniques ont été confirmées dans des élevages ovins depuis juin et un premier foyer clinique dans un élevage caprin a été confirmé en août (Figure 3).

Dans le cadre de la surveillance programmée, 83 foyers ont été détectés chez des bovins.

Toutes modalités de surveillance confondues (Figure 4), l'augmentation du nombre de foyers se poursuit ; notamment le nombre de foyers cliniques est en nette augmentation depuis juin (Figure 5). Sur les 116 foyers, 49 ont été confirmés en juillet et 55 en août.

Au 24 août 2017, 55 foyers avaient été détectés en Corse-du-Sud et 61 en Haute-Corse. En Corse-du-Sud, 40 foyers sur 55 ont été détectés dans le cadre de la surveillance programmée. En Haute-Corse, 43 foyers sur 61 ont été détectés dans le cadre de la surveillance programmée.

Figure 2- Nombre d'élevages testés par espèce et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 2- Nombre d'élevages testés par espèce et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 3 - Nombre de foyers par espèce et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août

Figure 3 - Nombre de foyers par espèce et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août

Figure 4 – Nombre d'élevages testés par mois et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 4 – Nombre d'élevages testés par mois et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 5 - Nombre de foyers par mois et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Figure 5 - Nombre de foyers par mois et par modalité de surveillance du 1er janvier au 24 août 2017 inclus

Sur 1 109 animaux ayant fait l’objet d’une analyse, 294 ont été confirmés positifs, dont 31 détectés faiblement positifs (Tableaux 3 & 4).

Tableau 3 – Nombre d’animaux analysés inclus dans les différents programmes de surveillance en Corse, entre le 1er janvier et le 24 août 2017 inclus (sont exclus les animaux ayant fait l’objet d’investigations secondaires à une première détection, en particulier les prélèvements dans le cheptel d’origine d’un animal détecté faiblement positifs dans le cadre de la surveillance programmée à l’abattoir dans le but de déterminer le sérotype concerné)

Tableau 3 – Nombre d’animaux analysés inclus dans les différents programmes de surveillance en Corse

TOT: Nombre total d'animaux testés, 2A: Nombre d'animaux testés en Corse du Sud, 2B: Nombre d'animaux testés en Haute-Corse

Tableau 4 - Résultats des analyses pour les animaux inclus dans les différents programmes de surveillance en Corse, entre le 1er janvier et le 24 août 2017 inclus

 

 

Janvier

Février

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

Total

Positifs (positifs faibles inclus)

0

0

2

1

0

19

105

167

294

Négatifs

68

67

97

80

61

156

191

95

815

Nombre total d'animaux

68

67

99

81

61

175

296

262

1109

% animaux positifs

0

0

2

1,2

0

10,8

35,5

63,7

26,5

 

Le ratio animaux positifs sur animaux testés avait augmenté en juillet et a encore nettement augmenté en août. Le sérotype 4 a été confirmé chez 271 des 294 animaux trouvés positifs en FCO. On observe également une nette augmentation de la proportion d’animaux porteurs du virus, parmi celle testée par RT-PCR, en août.

Conclusion

Un premier foyer a été détecté chez des caprins suite à une suspicion clinique. Les seuls signes observés chez les caprins dans cet élevage étaient des avortements (NB : pour mémoire, l’avortement n’est pas un signe d’appel de suspicion clinique de FCO, même si des avortements peuvent être observés). Le statut vaccinal des animaux reste à investiguer. En l'absence d’autres signes évocateurs de FCO, la cause réelle des avortements pourrait être due à d'autres facteurs qu'il faudrait également investiguer, l’hyperthermie pouvant cependant être impliquée.

Jusqu’à présent, au vu des suspicions cliniques confirmées, l’infection par le virus FCO de sérotype 4 apparaissait n’entraîner des signes cliniques que chez les ovins. Des signes cliniques absents ou peu marqués chez les bovins expliquent très vraisemblablement que les foyers dans les élevages bovins n’aient été détectés que dans le cadre de la surveillance programmée.

La nette augmentation du ratio d'animaux positifs sur animaux testés, le nombre croissant de foyers cliniques et les résultats positifs obtenus lors de la surveillance à l’abattoir indiquent que le virus de la FCO sérotype 4 est présent dans l’ensemble de la Corse et qu’il peut entraîner des signes cliniques importants chez les ovins non vaccinés. Dans ce cas, la vaccination revêt donc un double intérêt : celui de protéger les ovins individuellement de la maladie et celui visant à l’éradiquer (sous réserve de sa bonne application, à l'échelle populationnelle de toutes les espèces sensibles).

La surveillance programmée atteint depuis juillet les objectifs décrits par le protocole et permet de maximiser les probabilités de détection du virus chez les bovins. La surveillance clinique est, quant à elle, essentielle pour la détection du virus chez les ovins et les caprins, cependant le foyer détecté chez les caprins reste à investiguer.

Remerciements

Nous remercions les DDPP de Corse et le LVD de la Haute-Corse de nous avoir fourni les commémoratifs des suspicions cliniques.

Encadré:


Historique de la maladie en Corse

La fièvre catarrhale ovine (FCO) est une maladie vectorielle due au virus Bluetongue (BTV) transmise par des moucherons du genre Culicoïdes. On connaît aujourd’hui 27 sérotypes du BTV (Maan et al., 2015 ; Zientara et al., 2015). La Corse a été exposée à de nombreuses incursions de virus BTV, impliquant le sérotype 2 en 2000, le sérotype 4 en 2003, le sérotype 16 en 2004 et le sérotype 1 en 2013 (Sailleau et al., 2015). Ces quatre sérotypes avaient été détectés suite à des suspicions cliniques sur ovins et étaient préalablement présents en Sardaigne. Concernant le sérotype 4, une étude avait notamment montré que ce sérotype circulait en Corse depuis mai 2003, bien que détecté qu’en octobre 2003 suite à une suspicion clinique (Gerbier et al., 2008).

Le sérotype 4 est à nouveau apparu en janvier 2016 en Sardaigne, puis en décembre 2016 en Corse (Sailleau et al., 2017). La vaccination contre le BTV-4, en plus de la vaccination déjà réalisée contre le sérotype 1, avait été rendue obligatoire en Corse et financée par l'Etat suite aux premiers cas déclarés en Sardaigne. Les arrêtés encadrant et permettant le financement de la vaccination BTV-4 ont été signés le 15 septembre 2016, et les vaccins BTV4 étaient disponibles dès mai 2016 (Calavas, 2016).

Découverte du premier foyer de FCO-4 en 2016

Le premier foyer a été suspecté en novembre 2016 à Bonifacio en Corse du Sud, dans un élevage mixte ovins-caprins et confirmé par le LNR (laboratoire national de référence) de l’Anses Maisons-Alfort. Neuf brebis avaient présenté des signes cliniques, causant la mort de huit d’entre elles. La direction départementale en charge de la protection des populations (DDecPP) a alors mis en place des mesures pour prévenir la propagation de la maladie : surveillance renforcée de l'élevage concerné avec interdiction de sortie des animaux. Cette incursion n’a pas modifié les conditions de gestion de la FCO en Corse, car la Corse était déjà en territoire réglementé vis-à-vis de ce sérotype. La surveillance programmée (cf. infra) a donc continué à être mise en œuvre pour détecter le plus précocement possible la circulation du virus et déterminer sa répartition sur le territoire corse.

En 2017, des foyers ont été confirmés en Corse, dès le mois de mars, chez des bovins sans signes cliniques, dans le cadre de la surveillance programmée.

Modalités de surveillance

Surveillance programmée

Un dispositif de surveillance programmée a été mis en place en Corse en juillet 2013 pour démontrer l'absence de circulation virale et recouvrer un statut indemne sur le territoire corse vis-à-vis des sérotypes 1, 2, 4, 8 et 16. Le protocole permet de détecter une prévalence d'infection supérieure ou égale à 5 %, avec un intervalle de confiance de 95 % dans chaque département corse. Elle repose sur l'analyse de 60 animaux (en privilégiant les bovins âgés de 6 à 12 mois non vaccinés, sélectionnés de façon aléatoire parmi ceux provenant d’une exploitation située dans le même département que l’abattoir) par département et par mois prélevés à l'abattoir tout au long de l’année. Les prélèvements de sang sur EDTA sont effectués directement à l'abattoir. Ils sont transmis ensuite au LNR pour réaliser une analyse par RT-PCR de groupe, permettant la détection du virus BTV, tous sérotypes confondus. En cas de positivité, le LNR réalise l'isolement viral et identifie le sérotype du virus.

Surveillance événementielle (clinique)

La surveillance événementielle (clinique) a été renforcée par des messages de sensibilisation auprès des éleveurs et vétérinaires. Elle repose sur l’analyse par RT-PCR de tout animal présentant des signes cliniques suspects de FCO avec l'obligation de signaler l’événement à la DDecPP.

Enquêtes

Des enquêtes ont été réalisées en mars et en avril 2017. Elles sont conduites en cas de résultats faiblement positifs en RT-PCR (surveillances clinique et programmée), pour connaître le niveau de protection immunitaire d’un élevage, ou suite à un résultat positif sur animal importé d’une zone infectée par le BTV.

Pour les trois modalités de surveillance, un élevage est considéré comme infecté si au moins un animal présente un résultat positif en RT-PCR de groupe. Le sérotype est systématiquement déterminé par des RT-PCR spécifiques.

Signes cliniques

Parmi les foyers ovins confirmés, dans le cadre de suspicions cliniques, au 25 juillet 2017, les signes cliniques les plus fréquemment cités comptaient : l’abattement, la chute de l’appétit, la chute de la production laitière, l’hyperthermie, la tachypnée, la dyspnée, l’œdème de la face, le jetage nasal, les croûtes sur le mufle. Un nombre maximal de vingt animaux atteints a été signalé dans deux élevages, et entre un et trois animaux morts ont été attribués à la maladie dans trois élevages (morbidité 2,6% et mortalité 8,5%).


Références bibliographiques

Calavas D, 2016. Foyer de FCO à sérotype 4 en Corse. Plateforme ESA. Publié le 2. décembre 2016 (https://www.plateforme-esa.fr/article/foyer-de-fco-serotype-4-en-corse).

Gerbier G, Baldet T, Tran A, Hendrickx G, Guis H, Mintiens K, Elbers A R W , Staubach C, 2008. Modelling local dispersal of bluetongue virus serotype 8 using random walk, Prev Vet Med, 87(1), 119-130.

Maan S, Maan NS, Belaganahalli MN, Rao PP, Singh KP, Hemadri D, et al., 2015. Full-Genome Sequencing as a Basis for Molecular Epidemiology Studies of Bluetongue Virus in India. PLoS ONE 10(6): e0131257. doi:10.1371/journal.pone.0131257.

Sailleau C, Breard E, Viarouge C, Gorlier A, Quenault H, Hirchaud E, Touzain F, Blanchard Y, Vitour D, Zientara S. Complete genome sequence of bluetongue virus serotype 4 that emerged on the French island of Corsica in December 2016. Transbound Emerg Dis. 2017 May 11 doi: 10.1111/tbed.12660.

Sailleau C, Viarouge C, Bréard E, Perrin JB, Doceul V, Vitour D, Zientara S. Emergence of Bluetongue Virus Serotype 1 in French Corsica Island in September 2013. Transbound Emerg Dis. 2015 Oct;62(5):e89-91. doi: 10.1111/tbed.12207.

Zientara S, Sailleau C, Viarouge C, Hoper D, Beer M, Jenckel M et al., 2015. Identification of a novel Bluetongue virus in goats in Corsica, France. Emerg Infec Dis. 20(12), 2123-2125.

  • 1.Pour les élevages où le virus a été détecté plusieurs fois depuis mars 2017, seule la modalité de surveillance qui a permis de détecter la FCO pour la première fois a été considérée lors de la classification des foyers selon les modalités de surveillance